La tyrannie du vacarme
Les nuisances sonores sont plus présentes que jamais. Au point qu’il devient presque impossible de se retrouver là où le silence existe encore afin de jouir pleinement des sons de la nature.
Le bruit excessif a tendance à se généraliser au Québec. Au Regroupement québécois contre le bruit (RQCB), nous croyons que le bruit est en train de devenir un fléau, tant à la ville qu’à la campagne. L’été, les motomarines et autres hors-bord ainsi que les véhicules tout-terrain tapageurs et les motocyclettes ultrabruyantes assomment. Un peu partout, on subit les ravages des silencieux modifiés et des chaînes stéréophoniques des voitures poussées à plein volume. L’hiver, les motoneiges (puantes et polluantes à souhait) pétaradent sur tout le territoire. La campagne, la forêt et les milieux naturels cesseront-ils d’exister en tant qu’endroits de calme et de paix?
Ceux qui s’adonnent à des comportements bruyants n’en sont pas toujours conscients. Ce qui est hautement critiquable, c’est que ceux-ci ne se préoccupent pas de la qualité de vie des autres. Une culture du vacarme s’est tranquillement mise en place. Une culture nuisible, proche de l’incivilité. Il est plus que d’établir des liens et de former une forte opposition à ce mouvement pour cesser d’en subir les conséquences. Le bruit détruit la splendeur du monde, nous ne l’acceptons plus
En chiffres
Une motoneige équipée d’un moteur deux temps se compare, sur le plan de la pollution, à cent automobiles et un VTT équipé du même genre de moteur archaïque, à trente automobiles. Sans oublier que l’on peut sentir l’odeur laissée par le moteur d’une motoneige longtemps après son passage dans un centre de ski de fond ou de ski alpin. Quant à la motomarine (ce désastreux engin des lacs), en plus de polluer l’air et l’eau d’une manière révoltante, elle détruit l’environnement sonore de milliers de Québécois autour des points d’eau. Au son, il est possible de repérer ces abominables engins à un kilomètre de distance. Facile d’imaginer l’enfer sonore à moins de 100 mètres! Est-ce normal que des moteurs polluent, puent et étourdissent de la sorte au XXIe siècle? Les entreprises pourraient-elles produire uniquement des moteurs non polluants et non « puants »? Nous croyons que oui.
Pourquoi devrions-nous supporter les 100 à 105 décibels (selon les données de l’Ordre des orthophonistes et des audiologistes du Québec) générés par une motoneige, alors qu’une voiture n’en produit qu’entre 65 ou 70 décibels? Un écart monumental et inversement proportionnel à la taille des véhicules. Cette pollution sonore n’est pas un désagrément secondaire. Au Québec, cela devient un fléau occasionnant une variété de problèmes de santé bien réels.
Le son commence à être dangereux à partir de 85 décibels. Or, les « véhicules hors route » rejettent davantage de bruit dans l’environnement. Faut-il attendre de devenir sourds avant de demander aux entreprises de cesser de produire des véhicules pareils? Qu’on ne nous redise pas que les motoneiges ou les motomarines font quelques décibels de moins qu’auparavant, puisque ce fait est dérisoire par rapport à l’énormité du problème. Aucun de ces engins ne devrait produire plus de 75 décibels, aucun ne devrait posséder cette sonorité de scie à béton… et, tous devraient cesser d’être aussi pétaradants!
Les experts estiment que le bruit ambiant double tous les 10 ans. C’est inacceptable! Plusieurs organisations soulignent à quel point le bruit est néfaste pour la santé (stress, irritation, problèmes de sommeil, augmentation des maladies cardiovasculaires, perte importante d’acuité auditive chez des personnes de plus en plus jeunes, etc.).
Tout cela ne saurait perdurer. Il est plus que temps que les entreprises ,entre autres Bombardier Produits Récréatif (BRP), une compagnie québécoise leader dans ce domaine, se réveillent. Pourquoi BRP, par exemple, ne se mettrait-elle pas à l’avant-garde dans le domaine du moteur non bruyant? Elle pourrait en profiter pour produire des moteurs de remplacement pour les monstres sonores que sont les cigar boats qui empoisonnent l’existence d’un grand nombre de riverains du fleuve et nuisent aux rivières. Plusieurs se demandent même pourquoi ce genre de machines a droit de cité...
Le climat a perdu la boule à cause des gaz à effet de serre. Alors qu’il faudrait travailler à une réduction de la dépendance aux véhicules motorisés et à la réduction de la consommation de carburants fossiles, ces compagnies inondent l’espace public d’engins polluants et bruyants. De cette manière, elles contribuent à accroître le culte du « véhicule » que nous ne pouvons plus nous permettre.
Pourquoi ne pas travailler à construireune société respectueuse de l’environnement et plus agréable à vivre? Où la quiétude et le silence existeraient encore. Où tout bruit excessif inutile serait banni parce que néfaste. C’est un défi possible et une invitation à tous les Québécois d’y participer. Il suffit de se demander dans quel Québec nous voulons vivre sur ce plan.
Un appel est lancé à tous ceux qui partagent les préoccupations du RQCB. Visitez notre site Web (rqcb.ca), dialoguez avec nous pour trouver des solutions et joignez-vous à nous. Il est temps que les gens souffrant isolément se donnent une voix. Nous sommes des milliers à préférer la quiétude et la qualité de vie au vacarme et au bruit excessif. À nous d’oser prendre la parole.
Pour plus d’informations : www.rqcb.ca
Patrick Leclerc est le fondateur et le président du Regroupement québécois contre le bruit (RQCB), un organisme non gouvernemental apparu sur la scène publique québécoise à la mi-décembre 2006. Clinicien de formation, Patrick Leclerc travaille comme professionnel dans le domaine paramédical depuis plus de vingt ans. Étant donné l'absence d'organisme militant abordant spécifiquement ce problème dans la province, c'est à titre de citoyen et d'amoureux de la nature qu'il a décidé de s'impliquer personnellement dans la lutte contre la pollution sonore et de construire un site Web comme premier outil de sensibilisation, de réflexion et d'action. Il a donné jusqu'ici des entrevues dans les journaux et à la radio. Patrick Leclerc appelle toutes les personnes désireuses de préserver un environnement sonore de qualité à joindre leurs efforts à ceux du mouvement. Des porte-parole enthousiastes de divers horizons sont notamment appelés en renfort à ses côtés.