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Yves Gravelle : d’autodidacte à V14

Yves Gravelle est une bête de bloc. Même s'il grimpe à un niveau très élevé, rien ne lui fait plus plaisir que d'accomplir un mouvement difficile… dans son sous-sol! Entretien avec un grimpeur aux perspectives et aux méthodes uniques.

Lorsqu'il participe à une compétition de bloc, il est rare de voir Yves Gravelle plus d'une heure. C'est le temps qui lui est nécessaire pour compléter, la plupart du temps, tous les problèmes difficiles, se classer parmi les finalistes et prendre du repos jusqu'aux finales. Cette année, il a notamment gagné une étape du Tour de Bloc, le circuit national de la discipline (il a déjà gagné de nombreuses autres étapes de ces compétitions au cours des dernières années), et a ouvert deux V13 et répété plusieurs V12.

Il suffit d'une petite recherche sur YouTube pour constater qu'Yves Gravelle est doté de capacités physiques exceptionnelles. Une traction à un bras? Pas de problème. Des mouvements impossibles en campus – où le grimpeur « saute » d'une latte à l'autre, sans le soutien de ses pieds? Il le fait avec une facilité déconcertante. Le meilleur dans tout ça, c’est que le grimpeur de 28 ans originaire d’Ottawa est un autodidacte en matière d'entrainement : « Je connais un peu la méthodologie, pour suivre des cycles, mais je sais les trucs qui fonctionnent pour moi. J'aime varier ce que je fais, comme ça, le corps ne s'habitue jamais, sinon, tu atteins un plateau. J'essaie de beaucoup expérimenter avec la façon dont je m'entraine. Ce qui me motive et ce qui me rend plus fort, c'est vraiment de pouvoir le faire chez moi. »

« Ce qui m'attire en ce moment en escalade, c'est vraiment de faire les mouvements les plus difficiles que je peux », mentionne-t-il. Et c'est dans son sous-sol, à Gatineau, qu'il y parvient : sur un petit mur à 45 degrés, il a mis des dizaines de prises, toutes plus mauvaises les unes que les autres. Sur son mur, il y a certains projets sur lesquels il travaille depuis deux ans : « Quand j'en enchaine un, je suis plus satisfait que lorsque je fais des blocs difficiles dehors ou même après avoir gagné une grosse compétition », explique-t-il. « Lorsque je suis près de faire un mouvement, je ne veux plus sortir de chez moi, je ne veux que continuer à m'entrainer! »

« Au gymnase, c'est difficile de trouver des problèmes qui vont te demander de te pousser. Je travaille donc la force de mes doigts chez moi, et je vais ensuite dans une salle pour travailler des angles différents, faire plus de technique. Je pense que ça fonctionne bien pour moi »

Il dit d'ailleurs ne pas avoir de difficulté à s'entrainer seul. Véritable bloc de muscles, Yves Gravelle compte parmi les quelques Québécois (et Canadiens) qui ont enchainé des voies de bloc côtés V14 – un système de gradation de difficulté qui s'arrête pour le moment à V16. Pendant quelque temps, il s'est éclipsé de la scène. Mais ce n'était pas pour abandonner l'escalade : « Je me suis mis au taekwondo l'année dernière », dit-il. D'abord, pour s'aider à récupérer d'une blessure au genou, mais aussi pour gagner en souplesse : « Je n'aime pas trop courir, mais je cherchais une façon de me mettre en bonne forme générale. »

L'exercice semble avoir été profitable : il a récolté une médaille dans cet art martial et il gagne à nouveau les compétitions de bloc. S'il n'a pas été aussi présent sur le circuit de compétition canadien, c'est qu'il considère la « saison » trop longue, ce qui peut amener des blessures à la fin de la saison, au moment où il faut donner une meilleure performance. Non, il ne s'entraine pas toute l'année : « L'été, c'est trop chaud pour aller au gym. Je suis toujours moins motivé à ce moment-là, et je fais autre chose pendant un certain temps. Je donne aussi à mon corps du temps pour récupérer. » Le jeune homme se prépare également au passage de la Coupe du monde de bloc à Toronto, un évènement qui attire tous les gros noms du sport.

Pourtant, il estime qu'il pourrait un jour arrêter de faire de la compétition et se consacrer davantage à la grimpe extérieure : « Les compétitions, c'est tout le temps la même chose, c'est tout le temps le même monde. C'est moins excitant que ça l'était avant », dit-il. Son talent brut est pour le moment limité par... l'argent : « Je n’ai pas souvent la chance de faire des voyages. C'est peut-être pour ça que les gens pensent parfois que je ne fais plus d'escalade. » Son emploi actuel ne lui permet pas de ramasser suffisamment de sous pour aller dompter des problèmes de bloc un peu partout en Amérique du Nord – en outre, il travaille de nuit, ce qui pèse sur sa motivation : « C'est dur de faire une compétition après une nuit de travail! »

 
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