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  • Crédit: Sophie Limoges

Alberta Death Race : une course (presque) mortelle!

La Québécoise Sophie Limoges s’est donnée corps et âme dans la course en sentier la plus difficile qu’il existe au Canada. Lors de ses deux participations à l’Alberta Death Race (en 2009 et 2011), elle a fini sur le podium, mais n’en revient pas tout à fait indemne. Retour sur cette course qui conduit jusqu’au-delà des limites humaines!

Qu'est-ce qui fait le caractère de cette course ?

Il s’agit d’une véritable course d’aventure pendant laquelle on doit courir 125 km en moins de 24 heures. On commence le parcours en journée puis on continue toute la soirée jusqu’à l’arrivée dans la nuit ou le lendemain matin, sans autre pause que cinq ravitaillements. Le circuit forme une boucle au départ du village de Grande-Cache en Alberta et parcourt les montagnes Rocheuses alentour avec l’ascension de trois sommets, soit un total de dénivelé de 17 000 pieds (1 300 mètres). Lors de la dernière section, on est amené à traverser en bateau une grosse rivière au niveau de Hell’s Gate. C’est une partie qui s’inspire du thème mythologique du passage de la vie à la mort, d’où vient notamment le nom de la Death Race. Avant le départ, chacun reçoit une pièce à remettre à cette section au personnage qui incarne la Mort en échange de la traversée. Finir la course est symboliquement réservé à ceux qui ne sont plus tout à fait vivants. Ce qui se révèle presque vrai tellement la course est exténuante. Les organisateurs ont articulé tout l’événement autour de ce thème et ça donne une ambiance vraiment intense.

Tu y as participé deux fois, qu’est-ce qui te fait aimer cette course?

Cette atmosphère justement et puis le fait qu’elle ne ressemble à aucune autre. J’ai déjà participé à plusieurs courses en sentiers en Europe, autour du mont Blanc particulièrement. Elles sont bien organisées avec des écrans géants dans les villages pour suivre l’avancement des coureurs. La Death Race n’a pas la même ampleur en terme de participants et d’organisation, mais elle fait tout de même partie des courses majeures de ce type en Amérique du Nord et c’est la seule de cette intensité au Canada. Et puis, elle est vraiment authentique : la nuit, ce n’est pas impossible de croiser un ours ou un orignal sur les sentiers qui sont en fait leur terrain de vie et de chasse. Et puis, c’est aussi très impressionnant de voir que tout le village de Grande-Cache vit au rythme de la course. Les coureurs sont parfois invités à dormir chez les habitants comme moi et mon copain lors de mes deux participations. Les coureurs sont vraiment les bienvenus et l’événement devient une grande fête populaire.

Tu as terminé en première position chez les femmes en 2009 et deuxième en 2011 avec un temps de 15 h 55. Quels objectifs se fixe-t-on lors de ce genre de course?

À vrai dire, je ne me suis jamais impliquée de manière compétitive vis-à-vis des autres. La première année, je n’avais absolument aucune idée des performances que je pouvais donner dans une telle course. Le but ultime était de la terminer! Ce que j’ai fait dans un temps auquel je ne m’attendais pas du tout. En 2011, j’ai cherché à améliorer ce temps, à finir avant minuit et si possible à faire un podium. À cause de problèmes de nausée, je n’ai pas réussi à m’alimenter en dehors des points de ravitaillement et ça m’a coûté de l’énergie. Mais dans ce genre de course d’endurance, c’est vraiment la théorie du lièvre et de la tortue. Il y a ceux qui filent et ceux qui persévèrent. Je ne suis pas très performante dans les montées, mais j’ai un très bon rythme et je récupère le temps perdu dans les descentes. J’ai donc continué avec positivisme, sans me soucier de ma position dans le classement. Je me suis rendu compte à l’arrivée que j’avais battu mon temps de 40 minutes par rapport à 2009, qu’il n’était pas encore minuit et que j’étais deuxième parmi les femmes! Mes objectifs étaient atteints. 

Quels conseils peux-tu donner à ceux qui souhaitent se lancer?

Courez et ne baissez jamais les bras! Je suis kinésithérapeute dans la vie, j’ai donc la chance de très bien connaître le corps, ses performances possibles et ses faiblesses. Je suis à l’écoute du mien tout en entraînant mon moral à être en mode positif. Une coureuse a connu une expérience malheureuse l’année dernière lorsqu’elle a été heurtée dans la première section du parcours. À la suite de sa chute, elle s’est fait un claquage de muscle. Malgré tout, elle a continué en marchant et elle a terminé la course en 22 heures sous les encouragements de tout le village. Son moral a été le moteur de son corps. Bien entendu, pour entreprendre une telle course, il faut aussi être capable de surmonter des montées de plus de 900 mètres. Ça nécessite un solide entraînement et une très bonne connaissance de son corps : il faut courir en souplesse et non en puissance pour éviter les blessures. Et pour ne pas trouver le temps trop long, je donne beaucoup d’importance aux sections de la course. Je divise le parcours pour pouvoir me féliciter à chaque étape du chemin parcouru. Il faut enfin savoir lever la tête du sentier et regarder le paysage incroyable qui s’offre à nous; c’est une source d’inspiration et de motivation hors pair. Bref, entre la douleur de l’effort et la beauté des paysages, on ressort de cette course jamais totalement indemne…

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