Val d'Isère : ski, après ski et à-côtés exquis
Célèbre et célébré partout dans le monde comme étant l’un des meilleurs domaines skiables de la planète blanche, Val d’Isère – et son incontournable voisin Tignes – offre la promesse d’un séjour d’hiver inoubliable, qu’on soit débutant, intermédiaire ou sédentaire.
À un certain moment, vers le milieu de ma troisième journée à Val d’Isère, j’ai réalisé que j’avais mal aux joues depuis assez longtemps pour m’en inquiéter. Une montée d’angoisse hypocondriaque m’a alors envahi et mon esprit s’est mis à divaguer. Torsion du petit zygomatique? Entorse au muscle risorius? Irritation du buccinateur? Cancer du grand zygomatique?
« Papa, t’as le sourire étampé dans’ face! » de lancer fiston en voyant mon visage hagard et hébété, dopé par une surdose de dopamine. Je m’en souviens encore : nous venions de nous offrir le looooooong couloir panoramique du Mangard et son large mur sportif, et nous étions à bord du téléphérique du Fornet, qui mène aux hauts sommets de 3400 mètres de Val d’Isère. Bien assez pour esquisser un sourire, dans le pire des cas.
Le Mont Blanc vu de l'arête de Fresse © Yann Allegre, Val d'Isère Tourisme
Plus tôt en matinée, c’est le glacier du Pisaillas qui m’avait mis de fort belle humeur. On le serait à moins : entouré par la pointe du Montet et la coupole de l’Ouille noire – ça fait mal, une si jolie montagne en dôme –, il repose au cœur du parc national de la Vanoise, dans une sorte de cirque montagneux fantasmagorique.
La veille, le glacier de la Grande Motte avait lui aussi entraîné son lot de rictus incontrôlables. Accessible au terme d’une succession de remontées, dont un vertigineux téléphérique qui culmine à 3456 mètres, le sommet du géant bleuté avait ensuite effacé mon sourire pour le remplacer par une bouche bée : du haut de ce promontoire d’une indicible beauté, toute la région déploie sa blanche superbe piquée de crêtes, d’aiguilles, de pointes et de massifs, dont celui du mont Blanc. La moitié du plaisir de skier les Alpes n’est-elle pas de s’emplir les prunelles de leur colossale présence, d’admirer l’admirable qui s’élève de toutes parts?
Ce midi-là, après avoir enfourné goulûment un feuilleté de cailles au foie gras à l’un des nombreux restos de montagne du domaine – celui de la Folie Douce, une sorte de Beachclub alpin, la fine gastronomie en plus, les brutes épaisses en moins –, je suis redevenu hilare. C’est qu’après nous être faufilés près du chas de l’aiguille Percée, une curiosité géologique, fiston et moi avons enfilé avec un chouia de glisse hors-piste, au pied du drapé blanc percé de noires murailles alpines dominées par la masse dantesque de la Grande Casse (3852 mètres). Dans bien des stations des Alpes, deux univers parallèles se côtoient : des pistes damées et tracées comme des artères balisées, et entre elles, des pans entiers de champs neigeux inaltérés – autant de possibilités de sortir des pistes battues à la dameuse, et bien assez pour s’esclaffer de satisfaction.
À mon premier jour à Val d’Isère, j’ai cependant trouvé moins drôle la carte des pistes, une fois déployée sous mes yeux : même avec toute la meilleure volonté du monde, fiston et moi n’aurions jamais assez d’une semaine pour tout dévaler. Avec celui de Tignes, le domaine skiable compte ici 163 pistes couvrant 300 km de glisse (dont la mythique face de Bellevarde, une piste olympique à 65 % d’inclinaison), deux glaciers, des parcs à neige truffés de modules et 76 remontées reliant des secteurs de 1550 m à 3450 m. Tous sont desservis par des navettes gratuites qui rattachent le village à plusieurs remontées.
© Office de tourisme de Val d'Isère
En quelques schuss et une ou deux remontées ultrarapides, on passe aussi du domaine de Val d’Isère l’historique, l’élégant, le célébrissime, à celui de Tignes le moderne, le jeune cool fêtard, campé dans un cadre un peu tristounet (du moins au village de Tignes 2100, alors que Tignes 1550 arbore plus de cachet), mais toujours entouré de sommets si grandioses qu’ils en deviennent parfois intimidants.
Mais ce n’est pas parce que Jean-Claude Killy (triple champion du monde de ski) a évolué à Val d’Isère (tout comme le planchiste Mathieu Bozzetto, le skieur Léo Taillefer ou le triple champion de France Victor Muffat-Jeandet) que cette station demeure l’apanage des seuls experts aguerris de la glisse. En fait, elle est tout aussi familiale que parfaite pour les couples ou les groupes d’amis, avec un après-ski du tonnerre (en montagne et au village), des dizaines de restos aux mets savoureux (dont deux tables étoilées Michelin), un centre aquasportif (5000 m2 intérieurs pour les jours de grand froid) de même qu’un volet culturel comprenant un musée régional et un festival de films d’aventure, en place depuis 26 ans (au printemps).
© Office de tourisme de Val d'Isère
L’unique fait de pouvoir fréquenter ce village toujours animé, l’un des plus jolis et des mieux préservés de la France skiable, justifie d’ailleurs à lui seul le séjour. Avec ses ravissantes façades de pierre, ses grosses poutres apparentes, ses toits de lauze, ses ruelles étriquées et son église du XVIIe siècle, Val d’Isère exhale un doux parfum d’antan piqué d’authenticité et encapsulé dans une splendide unité architecturale.
Après une journée à s’épivarder sur les pistes, il fait bon s’y retrouver, flâner sous la lumière suave de ses lanternons ou trinquer avec les Avalins et les autres skieurs – composés à 40 % de Français. Peu de Nord-Américains se rendent d’ailleurs jusqu’ici, tout au fond de la dernière vallée avant le col de l’Iseran – le plus élevé d’Europe. De l’autre côté s’étend le parc italien du Grand-Paradis avec ses « retours d’Est », un phénomène météo où les nuages chargés de neige débordent du sommet des montagnes pour venir se délester du côté français. Résultat : avec 6 m d’enneigement en moyenne par année, Val d’Isère est l’une des premières stations françaises à ouvrir et l’une des dernières à fermer.
© Office de tourisme de Val d'Isère
Plus grand domaine skiable français à recevoir l’écocertification Green Globe, en 2016, Val d’Isère est présentement en attente d’une autre semblable reconnaissance, celle du label Flocon vert. Justement, l’été dernier, c’était la première fois qu’on ne pouvait skier sur le glacier du Pisaillas, faute d’accumulations suffisantes de neige, alors qu’on a déjà pu le dévaler jusqu’en août. Pas de quoi rire, et tout pour s’inquiéter, car on ne badine pas avec le réchauffement climatique, surtout après une année de sécheresses records et de canicules estivales.
Au terme de mon séjour, j’ai moi aussi commencé à être tourmenté. Avec tout ce que je venais de vivre comme expériences skiables exaltantes, n’aurais-je pas plutôt dû rire à gorge déployée, plutôt que de simplement arborer un sourire crispé? Une chose est sûre, c’est que je n’entendais pas à rire et que j’avais certes la gorge un tantinet nouée. « Papa, t’aurais pas un peu le motton par hasard? »
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Pratico-pratique
© Office de tourisme de Val d'Isère
Val d’Isère est située à 240 km ou 3 h de route de l’aéroport de Lyon, desservi en vols sans escale depuis Montréal sur Air Canada (aircanada.ca). On s’y rend en train par la gare de Bourg-Saint-Maurice (40 min), desservie par les navettes d’Altibus, un service aussi offert depuis l’aéroport de Lyon (altibus.com).
Tarifs du billet de ski : 63 euros/jour et 280 euros/5 jours (14-64 ans) pour Val d’Isère/Tignes.
Une trentaine d’établissements hôteliers sont disséminés un peu partout à Val d’Isère, dont le ravissant hôtel Le Val d’Isère, un chaleureux 3 étoiles (qui en vaut 4) avec chambres ultraconfortables, ravissante piscine intérieure, spa et délicieux petits déjeuners, le tout en plein cœur du village et à 5 min à pied des remontées.
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Au-delà du ski
© Gary Lawrence
À peu près tous les sports d’hiver se pratiquent à Val d’Isère, de l’escalade de glace au ski de rando alpine et hors-piste en passant par la raquette et le biathlon. Voici quelques suggestions d’activités qui se démarquent :
- Fatbike
De chouettes sorties (y compris en version électrique) au départ du village et au cœur des montagnes environnantes.
wattsupfatbike.com
- Hébertisme aérien (ou accrobranche) nocturne
Aussi offert de jour, mais la nuit, c’est féérique.
parcoursvalaventure.com
- Ice floating au lac de l’Ouillette
Une expérience de relaxation par flottaison dans l’eau glacée. evolution2.com
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