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  • Gorges du Saut du Tigre à 60 km au nord de Lijiang, province d'Yunnan © Shutterstock

Trois terrains de jeu pour s’éclater en Chine

L’empire du Milieu, c’est près d’un milliard et demi de Chinois. Mais c’est aussi près de dix millions de km2 de territoire. Imaginez l’abondance des aires naturelles qui y sont disséminées. Voici trois destinations de caractère pour en profiter, en rando et à vélo.

1. Les gorges du Saut du Tigre, entre défis et poésie

Derrière ce nom poétique digne d’un film d’action asiatique se cache l’une des randonnées les plus classiques de la province du Yunnan, dans le Sud-Ouest chinois.

Au départ du village de Qiaotou, un mince sentier serpente à flanc de montagne, au fil des refuges, avant de s’enfoncer à pic dans des gorges où grondent d’impressionnantes eaux tumultueuses. Chemin traditionnel, le sentier Haut commence tout en raideur, passant par la redoutée section des 24-Tournants, où l’on zigzague une bonne heure durant. Tournis garanti, aggravé par la vue plongeante sur la rivière Jinsha et les pics environnants.

À l’issue du dernier lacet, une commerçante vous attend avec moult boissons et denrées hors de prix. Mais vous avez vos provisions, n’est-ce pas? Comme cette poignée de mangoustans (un savoureux fruit asiatique à la coque rigide, parfait à transporter en rando) et ces petits biscuits fourrés aux fleurs, une spécialité provinciale.

Une fois cette passe éprouvante franchie, ça devient de la rigolade… dans tous les sens du terme. Le chemin s’aplanit, mais surtout, il est bordé de curieux panneaux bilingues. Même traduits en anglais, ça reste du chinois : « Forest such as love, fire on everyone », affiche par exemple l’un d’eux, dont la mystérieuse poésie semble plutôt vouée à la prévention des incendies.

Des haltes désaltérantes

On pourrait certes plier la randonnée en une journée, mais cela impliquerait de presser le pas, de se priver de l’ambiance apaisante des lieux et des agréables refuges nichés dans les vallées. L’auberge Tea Horse, à mi-parcours, dispose d’une superbe terrasse donnant sur la montagne du Dragon de Jade. Un poste idéal pour admirer, aux aurores, ledit dragon cracher sa boule de feu matinale dans le ciel. De la poésie, on vous dit.

Après quelques découvertes impromptues (une école champêtre, une chèvre déboussolée...), voici pointer le clou de l’excursion : le sentier s’enfonce enfin au cœur des gorges redoutées. Après s’être acquitté d’un scandaleux droit de passage auprès des villageois, c’est reparti pour une litanie de virages, jusqu’aux flots déchaînés et assourdissants. Quel spectacle! Les têtes brûlées peuvent même se pencher au-dessus de la marmite.

Mais là encore, des péages officieux ont été instaurés par les résidents des lieux pour accéder aux meilleurs points de vue. Grrr… ce n’est pas le grognement du tigre, mais celui du randonneur agacé. Une dernière sensation forte? L’échelle interminable et peu sécuritaire permettant de remonter à la surface vous la fournira.

> Quand partir : au printemps ou en automne. En hiver, le ciel est dégagé, mais c’est frisquet. Quelle que soit la saison, la météo peut radicalement changer en cours de journée.
> Où atterrir : aéroport international de Kunming (province du Yunnan, Sud-Ouest), à quelque 500 km des gorges. Correspondance possible vers Lijiang, à 80 km du site.
> Se renseigner :
voyageschine.com/randonnee-en-chine/gorge-du-saut-du-tigre.htm;
chinahighlights.com/lijiang/attraction/tiger-leaping-gorge.htm.
> Transports : nombreux bus depuis Lijiang et Shangri-La.
> Coût : droit d’entrée de 60 yuans (12 $) + péages locaux officieux (15 yuans, 3 $).
> Logement : nombreux refuges avec repas (Tea Horse, Jane’s, Halfway...).


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2. Le mont Hua, vertiges et cravates

Pourquoi ne pas profiter d’un passage à Xi’an, ville du centre de la Chine réputée pour sa célèbre armée de terre cuite enterrée, pour partir à la conquête du mont Hua, à une centaine de kilomètres de là? Ce quatuor de pics acérés, jaillissant à plus de 2000 mètres d’altitude, forme l’un des cinq sites montagneux sacrés du pays.

Les plus pressés et les plus paresseux (mais tel n’est pas votre cas, n’est-ce pas?) embarqueront dans l’un des téléphériques rejoignant l’un des quatre sommets cardinaux. Les autres graviront patiemment, au prix de quatre heures d’efforts, des marches taillées à même le roc. Ces escaliers artisanaux s’avèrent nécessaires, l’inclinaison étant tellement accentuée que toute ascension serait impossible sans matériel d’escalade.

À mesure que l’on prend de la hauteur, un véritable festival de précipices s’amorce, et à 360 degrés, s’il vous plaît. Pas étonnant que le mont Hua soit vénéré par les moines taoïstes, qui y ont érigé de nombreux temples : le concept de vide occupe une place prépondérante dans la philosophie du Tao; et du vide, au mont Hua, il n’en manque pas! En empruntant les parcours périlleux reliant les quatre pics, parfois formés de simples planches, des gouffres vertigineux servent de décor à votre numéro d’équilibriste.

Les vues panoramiques depuis les pics sont franchement exceptionnelles, enchaînant les falaises de granit taillées au couteau, garnies de touffes de végétation, évoquant certaines falaises du Verdon ou de Yosemite.

Sacrés randonneurs !

Les aventuriers sujets au vertige se décrisperont peut-être en croisant la drôle de faune qui gambade, en abondance, au gré de ces montagnes : j’ai nommé les touristes chinois.

Car il n’est pas rare, depuis l’installation du téléphérique ayant rendu ces sommets très accessibles, de côtoyer sur ces sentiers des marcheurs... en costard et cravate, chaussés de beaux souliers vernis. Agrippées à leur bras, de ravissantes Chinoises maquillées tentent laborieusement de garder l’équilibre sur leurs bottines à talons hauts. Et les voilà, gravissant de peine et de misère les incalculables marches de pierre du mont Hua, cigarette au bec. Prenez garde de ne pas rire trop fort, l’écho est particulièrement retentissant dans les environs.

Conseil : prévoir deux jours sur place, avec une nuit dans un temple taoïste, pour profiter pleinement des lieux. Gare à la brume, elle est fréquente et gâche le spectacle.

> Quand partir : d’avril à octobre; le ciel dégagé n’est cependant jamais garanti, brouillard et nuages y sont monnaie courante toute l’année.
> Où atterrir : à l’aéroport international de Xi’an Xianyang (province du Shaanxi, centre). Un train rapide part de la ville de Xi’an jusqu’au mont Hua, aussi appelé mont Huashan.
> Se renseigner :
bloguebonvoyage.com/2014/09/randonnee-mont-hua-chine.html;
travelchinaguide.com/attraction/shaanxi/xian/mt_huashan_2.htm;
topchinatravel.com/xian/mt-huashan-travel-tips.htm.
> Transports : un train rapide quotidien circule depuis Xi’an.
> Coût : droit d’entrée de 180 yuans (36 $), téléphérique à 80 yuans aller-retour (16 $).
> Logement : refuges taoïstes sur place.


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3. Shangri-La, un avant-goût du Tibet sur deux roue

Oui, le Tibet fait fantasmer nombre de pleinairistes, mais les conditions d’accès compliquées (permis spécial, guide obligatoire, frontières fermées aléatoirement) rendent l’aventure corsée. Or, il existe un moyen de se repaître d’un échantillon de cette légendaire région, et ce, sans tracasseries administratives : enfourcher un vélo de montagne et s’élancer sur les routes cernant Shangri-La, ville mythique au nord du Yunnan.

À prix d’or (entre 6 $ et 10 $ la journée), on y déniche aisément un destrier à pédales de bon aloi. Adieu, charmantes bâtisses de bois historiques, c’est parti pour une virée sauvage! Mais à peine cinq kilomètres plus loin, l’incontournable monastère tibétain Songzanlin nous force déjà à mettre le pied à terre. Et pour cause : cet immense complexe paré de dorures éclatantes et de fresques envoûtantes abrite quelque 500 moines fort accueillants.

Après cette mise en bouche tibéto-bouddhiste, passons au plat – ou plutôt au plateau – de résistance : une grande boucle de 30 kilomètres autour du lac Napa permet d’admirer et d’investir de vastes plaines où pacagent yaks et chevaux, tandis que se découpent à l’horizon les balbutiements de l’Himalaya, masses embryonnaires solitaires et enneigées.

Plus loin, une farandole de paysannes chinoises vêtues d’étoffes traditionnelles, l’échine courbée, laboure les champs à grands coups de houe. L’une d’elles lâche son outil pour lancer la main à cet étrange visiteur sur deux roues qui, lui, lâche son guidon pour immortaliser cette rencontre.

Notre journaliste en action © Courtoisie Sylvain Sarrazin

Le tour du lac effectué, on embraye sur LA route, la mal nommée G214, celle qui, si on en avait le temps et l’énergie, conduirait à la frontière tibétaine. Sur les abords de ce ruban d’asphalte fréquenté par une procession de poids lourds (heureusement, une bande latérale est aménagée), de multiples chemins de traverse s’enfoncent dans les montagnes environnantes. On les gravit, puis, essoufflés, on s’y adonne au hors-piste, entre vaches égarées et monuments bouddhiques.

Juché sur ces collines qui respirent l’aventure mystique, on prend une gorgée d’eau, dans une gourde généreusement renflouée un peu plus tôt par quelque villageois. Encore chaude, elle goûte légèrement la fumée. Cet arôme si particulier, ce doit être ça, l’avant-goût du Tibet.

> Quand partir : au printemps ou à l’automne. À près de 3400 mètres d’altitude, l’hiver est rigoureux; les étés sont pluvieux.
> Où atterrir : à l’aéroport international de Kunming, à plus de 600 km de là. Correspondance possible vers l’aéroport local de Zhongdian, également depuis Chengdu, Chongqing ou Lhassa (Tibet).
> Se renseigner :

yunnan-roads.fr/voyage/shangri-la/;
chinatravelplanner.com/yunnan/shangrila.html.
> Location de vélo : auprès des hôtels et auberges de Shangri-La. Bien vérifier les freins.
> Logement : nombreuses auberges de style tibétain à Shangri-La.

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