Traverser l'île d'Anticosti à pied
« Bravo ; tu fais maintenant partie des rares personnes à avoir traversé l’île à pied », me dit Gaétan Laprise en m’accueillant près d’un navire échoué sur la côte nord de l’île d’Anticosti au terme d’une randonnée en solitaire du 28 juin au 2 juillet.
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OUF ! QUEL VOYAGE !
Marcher 85 km en cinq jours, ce n’est pas un exploit même avec un sac à dos trop lourd. C’est de le faire sans sentier balisé dans un site si exceptionnel : une immense forêt d’épinettes blanches regorgeant de cerfs de Virginie qui sont ici chez eux. Parmi ceux que j’ai croisés, plusieurs voyaient un humain pour la première fois.
© Photo fournie par Mathieu-Robert Sauvé
Mais Anticosti, c’est surtout 10 millions d’années d’évolution d’une rive à l’autre – une particularité géologique qui devrait valoir à l’île le classement au Patrimoine mondial de l’UNESCO en septembre 2023 en Arabie saoudite.
Ici, le musée est à nos pieds. On n’a qu’à se pencher pour observer des fossiles de la première extinction de masse, survenue il y a 450 millions d’années. Il y en a une variété infinie, du bivalve au corail en forme de fleurs.
© Sarah Bergeron-Ouellet
Dans l’esprit du public, la plus grande île du Québec – 17 fois la superficie de l’île de Montréal – est un territoire exclusif de la Société des établissements de plein air du Québec (Sépaq).
Erreur. Sauf si on circule dans le parc national d’Anticosti, situé à l’ouest, on peut marcher sur l’île sans s’enregistrer, planter notre tente et déguerpir le lendemain sans laisser de traces !
UNE GRANDE TERRE PUBLIQUE
Les gens de Port-Menier, le seul village permanent, aiment rappeler que l’île est surtout une grande terre publique. Gaétan Laprise et Danièle Morin, qui habitent l’île depuis 40 ans et y ont élevé leurs fils Didier et Alexandre, se font un plaisir d’aider les randonneurs intéressés à « découvrir Anticosti autrement ».
Et c’est un des rares endroits où on peut remonter les rivières à pied jusqu’à leur source ; traverser la ligne de partage des eaux et redescendre de l’autre côté. Comme si on franchissait un continent en miniature.
© Photo tirée du site internet stage-of-tayos.com
Mon itinéraire consistait à remonter la rivière Chicotte jusqu’à sa source, et après une vingtaine de kilomètres de marche au GPS dans un brûlis et quelques marécages, j’ai atteint la rivière Patate qui m’a mené jusqu’à la côte nordique.
En toute liberté !
PETIT CONTINENT
Bon, il faut dire que le trajet n’est pas de tout repos. D’abord, il faut être assez en forme pour traverser à gué plusieurs fois par heure des cours d’eau en marchant sur des pierres immergées parfois traîtres.
Et l’itinéraire n’évite pas les nombreux barrages de castor qui parsèment la route au sommet de l’île. Comme il ne peut faire l’économie des chablis qui ralentissent le marcheur le plus intentionné.
Celui-ci doit pouvoir foncer dans des bosquets d’épinettes tricotées serrées quand le compas pointe dans cette direction.
Mais les paysages sublimes – par exemple cette piscine à l’eau turquoise creusée dans le roc au bas d’une chute – font oublier les ecchymoses et les attaques de mouches noires.
COMMENT Y ALLER ?
- Avion : la compagnie aérienne Air Liaison offre des billets d’avion aller-retour de Montréal et Québec à 500 $ en vertu d’un programme gouvernemental visant à encourager le tourisme régional.
- Bateau : le Bella-Desgagnés assure la liaison maritime vers Port-Menier à partir de Sept-Îles et Havre-Saint-Pierre.
- Navette terrestre : sur place, il faut prévoir un déplacement d’environ 200 km pour le départ de Chicotte-la-mer et un trajet de 125 km pour le retour de rivière Patate. Le tout doit être doublé pour votre accompagnateur. Compter 1,20 $ par kilomètre.
- Plus d'informations
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