Waterfront Trail : Au fil du Saint-Laurent à vélo
Longer la Waterfront Trail en autocaravane et s’y offrir quelques échappées cyclistes, tel a été le lot de notre collaborateur, au fil de son road trip de 2100 km en autocaravane le long du Saint-Laurent, du Québec à l’Ontario. Morceaux choisis de son périple.
Rouler à vélo, jour après jour, au fil d’un décor fastueux dont on arrive difficilement à détacher le regard, sur des chemins cyclables qu’on envie. Recenser les mille îles et partir en reconnaissance sur les plus avenantes. Faire escale sur un rivage accueillant. Y préparer son nid et prendre son temps pour que cela dure.
Chaque été, les berges du Saint-Laurent deviennent de magnifiques corridors thématiques qui font le bonheur de milliers de cyclotouristes. On oublie parfois que ce cours d’eau grandiose ne débute pas à Montréal, mais plutôt au lac Ontario; entre les deux, des centaines de kilomètres de voies cyclables riveraines et insulaires restent à découvrir.
Certains voudront enfiler le parcours d’une traite et décompter le temps sur le chrono… et c’est super. Mais le plaisir jouissif étant mon principal leitmotiv, j’ai plutôt égrené ce périple étape par étape, sans contrainte temporelle, en me déplaçant en autocaravane (VR) d’un camping à l’autre, d’une île à la suivante.
© Yves Ouellet
Roulant sur les segments les plus intéressants de la Waterfront Trail, et juste pour la beauté de la chose, j’ai prolongé l’itinéraire en dépassant l’embouchure du fleuve, surlignant sur la carte un trait rouge de la région de Beauharnois jusqu’aux îles de Toronto et Niagara.
La Waterfront Trail s’imbrique littéralement dans le circuit de vélo The Great Waterway, sur bande ou piste cyclable en continu, présentant des conditions optimales sur une distance totale de 2100km. L’itinéraire couvert ici, de Salaberry-de-Valleyfield à Toronto, fait de 500 à 600km — selon la curiosité de chacun.
Parc régional de Beauharnois
Véritable illumination dès l’amorce du périple, le parc régional de Beauharnois affiche plus de 70 km de pistes cyclables asphaltées qui bouclent les deux rives du canal de Beauharnois, autrefois densément industrialisé mais aujourd’hui rendu en bonne partie à la nature, avec des haltes bucoliques. La région compte d'ailleurs 140 km de pistes cyclables, dont un tracé tout neuf en rive nord du canal. Attention à la traversée de deux ponts sur trois, qui nécessite l’assistance du service Sécuri-Parc (450 225-0870).
Les îles du chemin Long Sault
Première étape ontarienne. Une parenthèse à partir de la route 2 donne accès à ce chapelet de onze îles paisibles des parcs du Saint-Laurent. Drôle d’endroit, à vrai dire, puisque ces magnifiques espaces verts sont submergés par une nature largement transformée par l’intervention humaine. L’archipel rectiligne a été formé par l’inondation de plusieurs villages lors de l’aménagement de la voie maritime du Saint-Laurent, dans les années 1950. On y a implanté un parc on ne peut plus pastoral avec ses plages, sa faune ailée et ses trois campings parallèles à la route cyclable.
À lire aussi : La Route des navigateurs à vélo
Brockville
© Shutterstock
De Long Sault à Brockville, on franchit un 90 km de pistes vraiment magnifiques, avec un contact visuel quasi constant sur le Saint-Laurent, puis l’amorce de la région-vedette du secteur : les Mille-Îles. Brockville demeure une petite ville plaisante à visiter, avec son architecture de pierres grises et de briques rouges, ses antiquaires, ses restos, le parc de la marina et le plus ancien tunnel ferroviaire au Canada, transformé en théâtre son et lumière.
Ivy Lea
À 43 km de Brockville par le 1000 Islands Parkway, Ivy Lea deviendra notre port d’attache pendant quatre jours, histoire d’alterner entre vélo et kayak de mer. Le séjour au camping Ivy Lea est mémorable, à la condition de choisir le secteur des quais Brown’s Bay (sans services) pour la tranquillité et le paysage. Le camping se trouve à l’ombre du
fameux pont des Mille-Îles, qui fait 13,6 km et enjambe la frontière avec les États-Unis. L’une des péripéties originales à réaliser dans le coin est d’ailleurs de se rendre sur Hill Island, au bout de la section canadienne du pont. Pas pour la qualité de l’expérience vélo, puisque l’emprise du trottoir est tellement étroite qu’on doit maintenir sa monture cambrée sur sa roue arrière pour faire passer le guidon; en revanche, aucun promontoire gratuit ne procure un point de vue plus impressionnant sur les Mille-Îles.
Gananoque et l’île Howe
Depuis Ivy Lea, c’est une joie de sillonner la Waterfront Trail de part et d’autre. Vers l’ouest, on a droit à une super belle virée à vélo dans la petite communauté de Gananoque jusqu’à Kingston. Au sortir de Gananoque, on s’offre comme gâterie le détour par l’île Howe en empruntant les deux bacs à câble gratuits. Une incursion en milieu agricole dans un monde qui bouge à peine, sans croiser un seul commerce d’un bout à l’autre du chemin de traverse.
On y constate cependant les premiers signes d’un phénomène qui préoccupe beaucoup les insulaires de la région et qu’on pourrait qualifier d’embourgeoisement des îles par l’action des citadins du Grand Toronto, qui achètent des terres pour y construire des résidences somptueuses, faisant exploser la valeur des propriétés.
Tout au long de la piste, on admire des dizaines d’îlots parfois à peine assez grands pour accueillir un chalet ou flanqués de véritables châteaux de conte de fées. Si on veut faire une croisière dans les Mille-Îles, Gananoque est un point d’embarquement populaire, mais Rockport, à l’est d’Ivy Lea, est nettement plus sympathique. Il est également très agréable d’emprunter à vélo la rue King, à Gananoque, où se tient un marché public fort convivial, face à la microbrasserie Gan. C’est bien beau, la pédale, mais une bonne bière en fin de journée, [*complétez la phrase*].
À lire aussi : Road trip en quête d'icebergs à Terre-Neuve
Prince Edward County
Sandbanks Provincial Park, Picton © Shutterstock
LA révélation! Bien que rattaché à la terre ferme au nord-ouest, ce canal qui relie la baie de Quinte au lac Ontario fait de Prince Edward County une grande île, au confluent du lac Ontario et du Saint-Laurent. C’est bel et bien ici que le fleuve débute.
J’ai perçu les lieux comme l’île d’Orléans de l’Ontario, avec ses nombreux vignobles, ses producteurs maraîchers, sa colonie artistique et son rythme de vie relaxe. Sa très longue dentelle côtière et son pays intérieur offrent aux cyclistes le seul terrain quelque peu abrupt entre la frontière et la région du Niagara. Peu de bandes cyclables ici, mais une
toile de petites routes pittoresques sur laquelle on a balisé deux circuits, pour une soixantaine de kilomètres.
L’un d’eux se dirige vers le chef-lieu, la charmante localité de Picton. L’autre, à l’ouest, nous amène vers une destination touristique appréciée des Québécois, le parc Sandbanks et ses plages exceptionnelles qui donnent sur un des Grands Lacs, le lac Ontario, qui se prend pour la mer. Ma blonde et moi y avons passé une journée merveilleuse à faire la tournée des vignobles à vélo en suivant West Wine Route (40km), goûtant d’excellentes
cuvées avec modération, discutant avec des producteurs passionnés et emplissant progressivement nos sacs à dos de crus prometteurs.
À l’autre bout de l’île, le secteur escarpé du parc provincial Lake on the Mountain offre de superbes perspectives sur la baie de Picton en passant par quelques vignobles, cidreries et fromagers. On voudrait s’arrêter partout et goûter à tout! Heureusement, le vélo nous interdit l’euphorie de l’ivresse et nous impose la sagesse au guidon…
Pratico-pratique
Les mois d’août et septembre demeurent la période idéale pour pédaler dans la région, vu la clémence de la météo, la moins grande fréquentation et la période des vendanges ou des récoltes en général.
Sur Prince Edward County (PEC), Bloomfield Bicycle demeure la référence pour tout ce qui concerne le vélo, en plus de fournir la meilleure carte cycliste de l’île. Mais on peut aussi s’en remettre au site prince-edward-county.com/item/cycling-maps.
On trouve des campings partout sur PEC, avec chalets ou tentes en prêt-à-camper, dont quatre au parc Sandbanks. Les plus petits campings privés demeurent les plus agréables et les plus accueillants, et ils proposent souvent de petits cottages pittoresques. Les campings du parc national Sandbanks disposent quant à eux de grands terrains
généralement ombragés. princeedwardcounty.worldweb.com/Lodging/Campgrounds
Tous les vignobles de la région proposent de déguster une sélection de leurs produits pour un prix minime, après discussion avec des spécialistes présents sur place. princeedwardcountywine.ca/fr/wineries
Le secteur est de Prince Edward County ne compte pas d’aménagement particulier pour les vélos, mais les routes 7 et 8 s’avèrent très tranquilles, affichent plus de dénivelés et comptent davantage d’entreprises agricoles qui offrent une grande variété de produits du terroir.