Chronique Himalayenne : le royaume de la marche
L’Himalaya est l’une des destinations de trek par excellence dans le monde. Pour ce troisième volet de notre série de chroniques himalayennes, quatre guides Québécois défrichent le terrain pour vous aider à vous y retrouver face à la multitude des circuits de randonnées dans cette région : Richard Rémy, président de la compagnie de voyage Les Karavaniers, Yan Blanchard, président de la compagnie Chinook Aventure, François-Xavier Bleau, directeur des opérations de Terra Ultima et Renée-Claude Bastien, guide et présidente de l’Association des guides professionnels en tourisme d'aventure (AGPTA).
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Le plus dur
Le trek les 3 Cols est, de l’avis de tous, le plus engageant et exigeant que l’on puisse faire en Himalaya. Une traversée entre le Makalu et le Khumbu, au Népal, qui franchit trois cols à plus de 5 000 mètres d’altitude : Le Renjo La (5 340 m), le Cho La (5 330 m) et le Kongma (5 535 m). « Ce n’est pas un simple trek, mais une randonnée technique et à certains égards, plus difficile que certaines ascensions. C’est aussi le plus spectaculaire, car il permet d’approcher le plus près possible d’un sommet de 8 000 mètres d’altitude, sans en faire l’ascension », dit Richard Rémy. Même son de cloche pour François-Xavier Bleau : « C’est un trek intense, un terrain fait de glace et de roche, dans une région avec peu d'infrastructures, peu habité, car en très haute altitude. » Un trek qui s’adresse donc à des sportifs, avec une bonne forme physique.
Le plus isolé
Difficile d’accès, le Dolpo est une région peu fréquentée du Népal, frontalière avec le Tibet et la Chine, très montagneuse. Le trek, qui parcoure la région pendant une vingtaine de jours, est situé en très haute altitude, ce qui en fait aussi l’un des treks les plus hauts. « C’est sa difficulté principale », explique Richard Rémy. « Avec 11 passages à plus de 5 000 mètres, sept cols dont le plus haut, le col Sangda, culmine à 5 460 m. Les villages que l’on croise sont à une altitude moyenne la plus élevée au monde. L’altitude y est inconfortable pour y vivre de façon permanente. Et les permis restreints y sont chers. Cela en fait une région très isolée. »
Pour Yan Blanchard, une autre région de l’Himalaya vaut le coup d’œil pour son isolement : « Le massif Api-saipal est rarement visité, avec des montagnes se dressent au-delà des 7 000 mètres. Une région éloignée, au nord-ouest du Népal, qui a peu changé, contrairement aux Annapurna ou au Khumbu où l’on peut boire un expresso et aller dans un salon internet! »
Le plus varié
Enclave tibétaine au Népal, longtemps fermé aux touristes et réouvert depuis 2002, le trek au Naar-Phu constitue « une aventure extraordinaire » assure Renée-Claude Bastien : « Rien que la route pour s’y rendre est magnifique. Avec ses précipices et ses cascades au bord du chemin, tu restes agrippé sur ton siège pendant trois heures, mais cela en vaut vraiment le coup. » Ce trek permet de parcourir trois régions très variées en une quinzaine de jours, avec « trois grands contextes culturels : hindouiste, bouddhiste et tibétain », comme l’explique François-Xavier Bleau. « Une variante intéressante est de partir du village de Naar pour se rendre jusqu’au Mustang. Un cinq jours "très wild", qui inspire plein de questionnements et de peur, avec un col à 5 600 mètres. »
Pour Richard Rémy, un autre trek fait aussi étalage de paysages et de cultures très variés : le trek autour du Kangchenjunga, le troisième sommet du monde (8 598 m). « On y trouve toute la variété que le Népal peut offrir. Un départ à 500 mètres d’altitude pour se rendre à plus de 5 000 m. On traverse plusieurs écosystèmes : tropical, des forêts de pins géants (presque aussi spectaculaires que sur la côte ouest canadienne), des rivières et une cascade hallucinante. En basse altitude, tu peux même te baigner dans les eaux chaudes avec vue sur les glaciers! » Une variété aussi culturelle : boudhiste en altitude, hindouiste dans les basses terres, avec une mixité entre les deux.
Le plus long
Le trek le plus long de l’Himalaya est le Great Himalayan Trail (GHT), une traversée du Népal d'est en ouest, 1 700 km et environ 25 hauts cols alpins sur 147 jours. C’est le trek en altitude le plus haut et le plus long du monde. « Une préparation physique et mentale est nécessaire pour effectuer le GHT » avertit Yan Blanchard. « Chaque section est assez exigeante, mais es efforts sont grandement récompensés avec l'opportunité de faire un trek parmi les plus hauts sommets du monde et de découvrir les traditions culturelles les plus fascinantes de la planète ».
Un autre trek réputé pour sa longueur est celui du Mustang et Saribung. Une boucle de 30 jours dans plusieurs régions du Népal, avec un parcours très changeant : traversée des glaciers de la chaîne montagneuse du Damoda, passage de plusieurs col dont celui enneigé du Saribung à 6 238 m, les villages et les monastères tibétains des villages de Phu et Naar, les cités troglodytiques, les lacs sacrés.
Le plus beau
Une catégorie éminemment subjective, tant les régions de l’Himalaya recèlent chacune de trésors et de merveilles. « Difficile d’en dégager un par rapport aux autres » confie Renée-Claude Bastien. « Cela dépend beaucoup de ce que tu recherches. La chaine de l’Himalaya et le Népal, c’est mon coup de cœur de voyageur. Je pourrais y passer ma vie entière que je n’en aurais pas fait le tour. En allant là-bas, tu ne peux pas te tromper! » Pour François-Xavier Bleau, la réponse est toute trouvée : le très populaire camp de base de l’Everest. « C’est le trek le plus impressionnant, par la beauté et l’immensité de ses paysages, la verticalité des sommets. Au Mont Mera, tu as une vue imbattable, l’un des seuls point vue où tu peux voir plusieurs sommets de 8 000 mètres ».
L’Himalaya côté rivière
L’Himalaya, c’est aussi le paradis pour le kayak et le rafting, avec ses nombreuses rivières et cours d’eau, alimentés par les glaciers des montagnes. François-Xavier Bleau recommande particulièrement la descente de la rivière Gandaki en rafting, prenant sa source au Mustang, traversant le Népal et l'Inde, puis se jette dans le Gange : « Elle boucle le tour des Annapurna, dans une région aride, mais avec une vue sur beaucoup de hauts sommets ». Mais attention, certaines rivières peuvent avoir un débit très fort. Une activité à faire surtout en été, mais à éviter donc pendant la saison de la mousson (de mi-mai à septembre)
L’Himalaya en vélo
Il est aussi possible de découvrir les régions himalayennes à deux roues. Par exemple, Le tour des Annapurna (Népal) est accessible en grande partie au vélo. Mais comme le rappelle Richard Rémy : « Ce trek a perdu en intérêt pour les marcheurs à cause de la route. C’est là mon seul bémol éthique au vélo dans ces régions. Que cela ne détruise pas l’économie locale des lodges qui ont besoin des marcheurs pour vivre et continuer à exister. » Parmi les treks intéressants à vélo, on pourrait citer notamment l’itinéraire Lhe (Ladakh) - Manali : un départ sur le plateau tibétain, avec des cols à 5 500 m d’altitude et une descente jusqu’ à 1 000 m pendant plusieurs jours, sur des chemins de terre. Pour Yan Blanchard, « la vallée de la Kali Gandaki est devenue une région idéale pour faire du vélo de montagne au Népal. Quelques pistes sur la terre peuvent se comparer à la grandeur de la gorge la plus profonde du monde, située entre les deux pics de 8 000 m de l'Annapurna et du Dhaulagiri ».