3 questions à Léon Thériault : rouler en paix!
Cycliste passionné, Léon Thériault est aussi très impliqué dans le milieu. La mission qu’il s’est donné : améliorer les conditions de sécurité des cyclistes sur la route. Car les cyclosportifs, ceux qui — de plus en plus nombreux — avalent chaque année des centaines et des milliers de kilomètres vivent encore une cohabitation difficile (et parfois dangereuse) avec les voitures...
La Route verte, qui sera officiellement inaugurée en juin prochain, offrira 4 300 kilomètres d’itinéraires cyclables. Est-ce une bonne solution pour améliorer la sécurité des cyclistes ?
La réponse est oui et non. Elle invite en effet à la pratique du vélo, mais davantage pour les amateurs de loisirs en plein air et de tourisme régional que pour les cyclosportifs. Vu le nombre grandissant de cyclistes voulant occasionnellement sortir de leur quartier et de la ville, la Route verte remplit bien son rôle, et il faut en féliciter les initiateurs.
Mais la Route verte ne répond pas aux besoins des cyclosportifs qui font du vélo pour s’entraîner, plusieurs fois par semaine, et roulent à des vitesses de 30/40 km/h sur des parcours de plusieurs dizaines, voire centaines de kilomètres. Ces cycloportifs, à eux seuls, cumulent plus de 60 % de tout le kilométrage franchi à vélo au Québec, tous cyclistes confondus. Cela donne une idée de l’importance qu'il y a à investir dans le respect que l'on est en droit d'attendre des autres usagers de la route; car ces cyclistes y ont droit au même titre que les 4, 8 ou 32 roues.
Vous êtes actuellement en relation avec des représentants du ministère des Transports et de la SAAQ dans le cadre de la refonte du Code de la sécurité routière (ndr : Cette refonte du Code est en cours et les commissions parlementaires se tiendront dès que le nouveau ministre responsable en donnera la commande, ce qui demandera sans doute – hélas – de nombreux mois.). Quelles sont vos revendications?
En commission parlementaire, nous recommanderons d’abroger l’article 492 du Code qui oblige présentement les cyclistes à emprunter les voies cyclables partout où il y en a. Les représentants des deux organismes ont reconnu que la cohabitation des clientèles les plus hétéroclites, en passant du chiot avec ou sans laisse aux poussettes, aux patineurs à roues alignées, aux rouli-roulants, au tricycle de mémé, aux piétons, ne permettait pas toujours d’atteindre les buts visés par la mise en place de pistes dites cyclables… Il en résulte même une fausse sécurité pour les nombreux cyclistes fréquentant les routes. En effet, nombre de conducteurs sont convaincus que les pistes cyclables existent partout pour se rendre là où l'on veut, et se rebiffent dès lors qu’ils aperçoivent un cycliste sur la route.
Par ailleurs, nous demanderons une meilleure sensibilisation des conducteurs aux articles 341 et 344 du même Code, qui portent sur le dépassement des cyclistes sur la route. Beaucoup de conducteurs ignorent l’existence de la « loi du tracteur » qui permet à un véhicule d’utiliser la voie de gauche pour dépasser un véhicule agricole ou un vélo, même s’il y a une double ligne continue. La SAAQ a déjà commencé à introduire des brochures à cet effet dans ses envois postaux aux conducteurs, mais nous souhaitons convaincre les représentants de la nécessité d’une publicité à la télé.
Enfin, nous souhaitons promouvoir le développement de bandes cyclables, tracées de chaque coté de la route, qui permettent au conducteur de prendre conscience du fait qu’il s’agit d’un territoire auquel il n'a pas accès, ce qui sécurise davantage le cycliste. Un expert international dans le domaine, M. Michel Ronkin, a clairement démontré l’intérêt de cette formule, qu’il recommande partout dans le monde.
Vous êtes l’initiateur au Québec du Tour du silence. De quoi s’agit-il ?
Il s’agit d’un événement se déroulant le même jour et à la même heure dans plus de 350 villes sur 4 continents. Mis sur pied par un Texan dont le meilleur ami, Larry Schwartz, s’est fait tuer après s'être fait renverser par un autobus il y a quatre ans, le Tour du silence invite tous les amateurs de vélo à rouler en peloton en silence, brassard noir au bras, en mémoire des cyclistes décédés sur les routes. De nombreuses régions au Québec ont joint le mouvement qui vise à sensibiliser les conducteurs à l’étroitesse de la bande de bitume — souvent impraticable — réservée aux cyclistes. Dans la région montréalaise, tous les clubs et villes de la rive sud de l’île se sont regroupés pour tenir le Tour du silence.
Le départ se fera le 16 mai prochain à 18 h 30 du Parc de la Cité, rue Gaétan-Boucher à Saint-Hubert-Longueuil. Des gerbes de fleurs seront déposées là où des cyclistes se sont fait mortellement happer.
> Infos : rideofsilence.org ou lltheriault@videotron.ca
