Parc national de la Pointe-Taillon : de l’eau, jaillit la terre
Coincé entre les 1 059 km2 du lac Saint-Jean au sud et la rivière Péribonka au nord, le parc national de la Pointe-Taillon fait figure de parenthèse terrestre dans cet univers aquatique. Une péninsule où cohabitent une flore composite, une faune qui en tire profit et l’Homme, à la présence tolérée, mais contrôlée.
La Pointe-Taillon est comparable à une maison, un logis verdoyant subtilement composé de différents milieux naturels. Un delta sablonneux fait office de fondations, tandis que le cordon forestier ceinturant toute la presqu’île rappelle un mur séparateur. Et l’eau n’est jamais bien loin, avec ses étangs, ses tourbières et ses marécages.
De nombreux animaux y ont définitivement élu domicile, comme les castors dont on peut apercevoir les constructions en bois. Pour d’autres, comme les orignaux, les loutres et les oies sauvages, c’est temporaire : ils viennent s’y reposer et s’y nourrir pendant la migration. Lors de vos excursions, ayez vos sens en alerte; de nombreux indices témoignent de la présence de ces espèces. Ainsi, il n’est pas rare de voir des traces de passage d’orignaux, ces derniers s’étant familiarisés avec la présence de l’homme et au bruit des véhicules.
Pour qu’on puisse le découvrir, le parc de la Pointe-Taillon s’est doté d’un calme réseau cyclable de 45 kilomètres sur de la poussière de pierre. L’exploration y est aussi possible, en kayak de mer, et permet de mieux apprécier la grande variété végétale du parc. On peut s’y arrêter plusieurs jours : le parc comprend de nombreux sites de camping, rustiques ou en formule « prêt-à-camper » avec des tentes Huttopia.
Sur sa façade méridionale, le lac Saint-Jean vient frapper 15 kilomètres de plage de sable gris et ocre, comme de la poussière de cuivre, qui lui donne des reflets bruns. Plus au large, l’eau reprend ses couleurs bleutées. Cette particularité s’explique par l’histoire culturelle du lieu : au début du siècle dernier, la Pointe-Taillon était scindée en de nombreuses parcelles agricoles. Environ 52 familles dépendaient de la municipalité de Sainte-Jeanne-D’Arc. En 1926, le lac Saint-Jean devint un lac réservoir et la majorité des terres fut inondée avec la fermeture des vannes de la centrale d’Isle-Maligne et Sainte-Jeanne-d’Arc fut rapidement désertée. La compagnie Alcan racheta les terres restantes et mit en place un programme de reboisement de 1948 à 1956. En 1977, le gouvernement du Québec acquiert la Pointe pour en faire d’abord une réserve de chasse, puis un parc national en 1985. En se baladant, il est facile de tomber sur les fondations des maisons de l’époque, même si la nature a depuis repris le dessus. De même, sur les bordures du lac ou de la rivière, où l’eau est peu profonde, on y devine les anciennes clôtures en bois et en barbelés qui délimitaient les parcelles agricoles. Les plus chanceux pourront même trouver des fers à cheval.
À l’extrémité ouest du parc, l’île Bouliane est une parenthèse naturelle, une bande de terre qui fait la jonction entre la rivière Péribonka et le lac. Son nom vient de la famille Bouliane, la dernière à quitter les lieux. On y accède par la navette nautique de la municipalité de Péribonka, pilotée par « Cap’tain Flo », qui vous parlera avec passion de son patrimoine culturel et environnemental.
De l’île, on aperçoit au nord, à une centaine de mètres, les chalets et les résidences secondaires bien rangés le long de la rive, mais la rivière agit comme une barrière aquatique entre la civilisation et la nature. Au coucher du soleil, c’est une douce quiétude qui vous envahit, au son des clapotis de l’eau et des chants vespéraux des oiseaux, troublés par instants par le bruit lointain des bateaux de pêcheurs qui rentrent à quai.
Mais cette petite « maison », à l’écart du monde, fait face à l’épreuve du temps. Elle est menacée par l’érosion, surtout sur sa rive sud. L’environnement sablonneux du parc est un milieu fragile, exposé aux vents dominants. Les vagues frappent les berges et emportent le sable pour le déposer au large. Privés de terre, les arbres s’effondrent, laissant leurs racines nues à l’air libre. On estime que, tous les ans, l’eau du lac grignote entre un et trois mètres de terre. Pour tenter d’enrayer le phénomène, le parc a installé des structures de stabilisation et mis en place un programme de suivi de l’état des berges.
Plus réjouissant, un projet d’agrandissement du parc est à l’étude. Il comprend l’annexion d’une trentaine d’îles, situées le long du littoral est du lac Saint-Jean, au large d’Alma et de Saint-Gédéon, et de quelques lots terrestres à Saint-Henri-de-Taillon et à Saint-Gédéon.
Superficie : 92,20 km2
Accès : le parc est ouvert tout au long de l’année. Il possède trois entrées : le centre d’accueil au secteur Taillon par le sud, le secteur Sainte-Monique par le nord, le secteur Péribonka via la navette maritime (6 $ aller, 10 $ aller-retour). Comme tous les parcs de la Sépaq, l’entrée est fixée à 6 $ pour les adultes et à 2,75 $ pour les enfants. Des tarifs spéciaux sont proposés aux familles et aux groupes. Interdit aux véhicules, le parc loue des vélos (12,25 $ de l’heure ou 34,75 $ pour la journée) et des embarcations (canot, kayak récréatif ou de mer).
Hébergement : trois zones de camping sont situées le long de la rive du lac Saint-Jean, respectivement à 2 km (« Les castors » : 33 sites pour tentes, 23 $/nuit), 3 km (« Les migrateurs » : 10 tentes Huttopia en « prêt-à-camper », 113 $/nuit) et 4 km (« Le prospecteur » : 30 sites pour tentes, 23 $/nuit) du centre d’accueil. Les deux autres sites sont basés à La Pointe-Chevrette, tout près de l’embarcadère pour la navette maritime vers Péribonka, et sur l’Île Bouliane, à l’extrémité ouest du parc (21,50 $/nuit).
Informations : 418 347-5371 • sepaq.com/pq/pta
Ce reportage a été réalisé grâce à Tourisme Saguenay−Lac-Saint-Jean et à la compagnie Équinox Aventure.