Vivre du plein air à l’étranger
Ils ont quitté le Québec pour se réaliser en tant qu’entrepreneurs. Pour eux, sport et affaires se négocient hors des frontières. Si certains vivent toujours à l’étranger sans songer à revenir au Québec, d’autres ont déjà bouclé la boucle d’un projet de vie, ailleurs dans le monde. Rencontres avec quatre sportifs québécois audacieux, qui ont osé s’installer dans un autre continent pour se lancer en affaires.
Caroline Gauvin, Icarai de Amontada, Brésil
S’exiler, c’était écrit dans le ciel de Caroline Gauvin, bien avant qu’elle ne déploie la voilure d’un kite. En 2010, cette jeune femme d’affaires, qui œuvre alors dans les domaines de la vente, du Web et du marketing, découvre le yoga et kitesurf. Ces deux disciplines allaient bientôt donner une tout autre direction au chemin qu’elle s’était tracé.
C’est au Costa Rica, alors qu’elle suivait une formation pour enseigner le yoga, que le déclic s’est produit. « J’ai toujours eu le pressentiment que je vivrais au bord de la mer, mais lors de ce cours intensif, j’ai compris que ça se réaliserait vraiment, dit-elle. C’est là que j’ai officiellement pris la décision de tout vendre et de quitter le Québec ». Son rêve : acheter un terrain et ouvrir un petit hôtel avec une école de yoga.
En quelques mois seulement, celle qui est aussi cofondatrice du magazine en ligne Ouikite.ca, destiné aux kitesurfeurs du Québec, était prête à faire le grand saut. Après avoir vendu sa grande maison de Sainte-Julie, et ne gardant que l’équivalent de trois valises, elle s’envole pour Icarai, un petit village de pêcheurs à 2 200 km au nord de Rio de Janeiro. Un paradis du kitesurf, où les vents soufflent à des vitesses de 15 à 25 nœuds, de juin à janvier.
Pour faciliter la mise en œuvre de son projet, Caroline a pu compter sur sa famille, mais aussi sur l’aide d’amis français établis à Icarai depuis plus de 9 ans. Aujourd’hui, les choses vont bon train pour l’entrepreneure : l’ouverture de son école, baptisée Villa Caribou, est prévue pour juillet 2017. « J’espère bien créer un endroit où les gens pourront profiter du yoga et du kite dans un environnement zen et coloré! »
Alexandre Vassilatos, Bali, Indonésie
Après avoir alterné sessions à l’université et étés dédiés au surf, et ce, aux quatre coins de la planète, le Montréalais Alexandre Vassilatos n’a pas attendu très longtemps pour quitter le pays et assouvir sa passion. « Dès que j’ai terminé l’université, je suis parti », dit-il.
À chacun de ses nombreux voyages à Bali, Alexandre comprenait quelque chose qui allait changer sa vie. « J’ai réalisé à quel point je n’avais pas besoin de beaucoup pour accéder au bonheur, dit-il. Avec 10 $ par jour, j’avais tout ce dont j’avais toujours rêvé : du surf, du temps et de la liberté ».
Une fois de retour au pays, il fait un premier pas vers l’exil en lançant Barefoot Surf Travel, avec son ami et partenaire Gabriel Lanoix. En quelques années à peine, l’entreprise, qui offre des voyages de surf à des débutants et intermédiaires, s’établit au Nicaragua, puis en Équateur et, finalement, à Bali.
« Après le Nicaragua, mettre sur pied l’entreprise à Bali était un jeu d’enfant, explique le surfeur. L’endroit est beaucoup plus touristique, les gens sont plus organisés. » Le plus difficile a été de trouver des « gens de la place » qui partageraient la vision qu’avait le Québécois de son entreprise; pour Alexandre, lorsqu’on s’établit à l’étranger, il faut créer des relations durables avec les membres de la communauté. C’est maintenant chose faite.
Les premières années, Alexandre faisait la navette entre le Nicaragua, le Canada et Bali. « Ce fut un départ graduel; les gens de mon entourage n’ont pas réalisé que je partirais pour de bon. Aujourd’hui, je ne passe qu’un ou deux mois par année à Montréal. » Le reste du temps, il est quelque part en Indonésie, entre son bureau et quelques-unes des plus belles vagues du monde.
Félix Tanguay, Verbier, Suisse
Mont Sainte-Marie, Sutton, Nouvelle-Zélande, Colorado, Whistler… Félix Tanguay, originaire d’Aylmer, enseigne le ski depuis l’âge de 16 ans. Un jour, certains de ses clients européens lui donnent l’idée de quitter le pays. « Ils me disaient que les montagnes étaient mieux en Europe, mais qu’ils ne trouvaient personne pour donner des cours de ski hors-piste comme à Whistler », dit celui qui a vécu cinq ans dans la célèbre station.
Ensemble, Félix et ses clients ont alors l’idée d’ouvrir une école de ski hors-piste en Europe et s’entendent pour prendre le temps de bien choisir l’emplacement. C’est finalement Verbier, en Suisse, qui retient leur attention. « Il y a là des familles établies depuis des générations, c’est une vraie communauté qui existait avant la station de ski, dit-il. Je me sens mieux ici, c’est authentique, c’est le vrai monde ».
La première année, Félix déniche un boulot dans une école de ski locale, ce qui lui laisse le temps de mettre sur pied son projet d’école de ski et de recruter ses premiers instructeurs. « Au départ, j’en avais trois; aujourd’hui, ils sont 55, répartis dans trois écoles. » Son entreprise, Powder Extreme, est entrée en activité en 2003; par la suite, Vivid, consacrée à la planche à neige, et Performance, pour l’enseignement du ski sur piste, sont venues compléter l’offre de service initiale.
Désormais, l’épouse et les deux enfants de Félix passent l’hiver avec lui à Châbles, tout près de Verbier; l’été, toute la famille se déplace vers une résidence secondaire au Portugal, pour alimenter – et assouvir – leur passion pour le surf. Vont-ils un jour revenir au Québec? Pas du tout. « La Suisse, c’est le plus beau pays du monde, et en plus, c’est central : on passe nos week-ends au Maroc, en Bulgarie, en Italie... La qualité de vie est imbattable, c’est un petit paradis! »
André Roy, Bocas del Toro, Panama
Au départ, ce n’était qu’un long voyage en Amérique latine : une année sur la route, en famille. « On était au Costa Rica et tout le monde parlait de Bocas del Toro, dit André Roy, de Granby. Alors on y est allés! » Le hasard fait bien les choses, et la famille tombe rapidement en amour avec l’endroit : l’énergie, les gens, le surf et... la plongée.
De retour au Québec, André Roy fait l’acquisitioncomplète l'achat d’une école de plongée au cœur de l’archipel de Bocas. « On n’a pas fait ça pour s'acheter un emploi, mais pour s'offrir une qualité de vie », dit-il. Quelques mois plus tard, il s’envole seul pour conclure la transaction et donner le coup d’envoi à ce grand projet.
Bien vite, le mal du pays se fait sentir, malgré deux appels quotidiens par Skype et les visites fréquentes de sa femme et de ses enfants. « Le jour, c’est le paradis, mais le soir, la vraie vie prend le dessus et la solitude l’emporte, à moins de suivre les touristes dans les restaurants et les bars, et de faire la fête avec eux, explique le plongeur. C’est normal, ils sont en vacances. Mais toi, tu travailles le lendemain… »
C’est donc pour sa famille qu’André est revenu au Québec, après 2 ans. « Ça me manquait trop. On avait démarré ce projet-là pour vivre une belle expérience, et ça nous a rapprochés au début. Mais par la suite, c’est devenu trop difficile. Mon gars avait 14 ans et avait besoin de son père », explique l’entrepreneur.
Bocas Diving Pirates lui appartient toujours, mais c’est un ami qui en assure la gestion pour l’instant. La famille retournera y passer ses étés, puis s’y installera à temps plein, mais plus tard. « Mon autre fils a fait des études en restauration et pour lui, c’est clair : il veut ouvrir son restaurant dans le Sud… »