Sylvain Burguet : Achille trahi par son talon
530 kilomètres… 531… 532… 533… et puis, plus rien. Au sixième jour de son défi de 1 000 kilomètres entre Gaspé et Montréal, Sylvain Burguet s’est arrêté de courir. Lâché par la seule chose que l’on ne peut pas contrôler, la défaillance physique. Toute simple, toute bête, mais qui vous arrête net : une tendinite aigüe au talon d’Achille. Une douleur insupportable qui, comme pour le héros légendaire de la mythologie grecque, a mis fin aux espoirs de Sylvain.
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« Prendre la décision d’arrêter fut difficile pour le moral », confesse-t-il. « Je suis forcément triste de n’être pas allé au bout, car j ai mis toutes mes tripes sur la table. Mais il y a aussi de la fierté. Celle d’avoir pu prendre le départ dans des conditions idéales : physiques, psychologiques et matérielles. Tous les facteurs étaient réunis pour que ce soit une belle expérience, dès le départ à Gaspé. Après, adviendrait ce qu’il adviendrait... »
1 000 kilomètres de course à pied pendant 10 jours (du 26 septembre au 05 octobre), le défi était peut-être trop grand pour un simple mortel. Mais, pour Sylvain Burguet, il avait sa raison d’être, au delà de la performance sportive : « Le but était de réaliser ce projet ambitieux, qui pouvait faire peur, en équipe, avec une logistique et un collectif pour m’accompagner et m’aider. Chacun a donné son maximum. J’ai réussi à inspirer pas mal de personnes à travers ce que l’on a entrepris. On a vu la réaction du public sur le parcours et sur les 10 km de course ensemble qui finissaient chaque journée. Pour tous ces moments partagés, de par le dispositif mis en place, c’est une réussite ».
À l’automne 2013, un an plus tôt, Sylvain Burguet avait réussi à rallier les 246 km qui séparent Montréal et Québec en 41 heures. Deux défis aux succès variables, mais qui montrent bien la trempe du garçon, toujours en train de pousser et repousser les limites de son corps. De ce défi, le coureur a beaucoup appris : « Dans les épreuves d’endurance, on dit souvent que, "quand il n’y a plus d’énergie, il y en a encore". Là, j’ai pu le vivre pleinement. Arriver à redémarrer le lendemain, après une nuit de repos, dans des conditions meilleures que la veille au soir. On réalise vraiment que le corps est une machine exceptionnelle. L’histoire n’est jamais terminée, tant qu’une défaillance physiologique n’intervient pour y mettre fin ».
La machine a cédé après avoir « plusieurs fois frappé des murs » mais en arrivant toujours à les surmonter jusqu’au bout de l’épuisement. « J’ai vécu au quotidien le fait de rentrer dans un état méditatif pour être capable de continuer à courir. Tu sais que chaque journée qui passe, tu perds énormément de forces et d’énergie. Comment être capable de passer à travers la fatigue, quand tu as parcouru 300 km et qu’il t’en reste 700 à faire ? Il faut prendre le moment comme il vient, un pas à la fois, un bobo à la fois... Prendre son temps, ne pas s’impatienter pour arriver le soir à bon port. Toujours se répéter qu’un défi passe aussi vite qu’il arrive. Ce sont des expériences humainement inoubliables, avec le sens du collectif et du partage ».
Quelques jours après la fin de son défi, subissant encore les séquelles physiques de sa course folle, Sylvain Burguet confiait son envie de retenter l’expérience : « Je suis un gars de défi. J’ai beaucoup d’idées et d’envie. Ça passe par la course, mais aussi par le vélo, la natation... Deux autres sports qui me tiennent beaucoup à coeur. Gaspé-Montréal, je l’ai encore dans la tête, mais, dans les prochaines années, je veux surtout m’évertuer à transmettre ce goût du défi et au grand public. Leur faire vivre, à leur échelle, ce genre d’expérience ».
Tel le Phoenix renaissant de ses cendres, on devrait donc très vite entendre parler de l’infatigable Sylvain Burguet !
Le défi Sylvain Burguet en chiffres
6 jours.
533km parcourus.
Plus de 700 000 pas effectués.
42 650 calories brulées.
22.5 litres de liquide consommé.
30 heures de sommeil.
35 sacs de glace utilisés.