Yves Beauchamp : aux frontières du réel
Non, Yves Beauchamp n’est pas un personnage de la série de science-fiction X-Files. Pourtant, pour le commun des mortels, c’est un extraterrestre du sport. Le Lavallois pratique l’ultra triathlon, enchainant la natation, le cyclisme et la course à pied sur des distances Ironmam : 3.8 km de nage, 180 km de vélo, 42.195 km de course.
Mais, Yves Beauchamp aime encore plus l’endurance et prend part à des doubles et triples Ironman. En octobre 2012, il a réussi à terminer un quintuple Ironman au Mexique : 5 Ironman en 5 jours. Quelques jours auparavant, il avait bouclé sa série de 4 doubles Ironman, dont 3 en 7 semaines. Des performances qui lui ont permis de remporter le titre de vice-champion de la Coupe du monde du double Ironman du circuit IUTA (International Ultra Triathlon Association). Une bête de course qu’on vous dit !
Rencontre avec cet « homme de fer », qui ne cesse de repousser les barrières de son corps, les frontières de son réel.
Comment vous préparez physiquement et mentalement à de telles épreuves ?
Je m’entraine avec plus partenaires, en moyenne 30 heures par semaine. Mais, j’ai un petit côté rebelle, mes grosses charges d’entraînement se font au feeling, en fonction de mes sensations. Je fais beaucoup de foncier, de volume, pour être parfaitement prêt physiquement le jour de la compétition. Cela passe également par une préparation mentale, être prêt à affronter le temps et les douleurs, à en faire abstraction. L’ultra triathlon, c’est un sport qui demande un sacrifice de soi, un don de soi.
Qu’est-ce qui compte le plus : le physique ou le mental ?
Le mental est décisif pendant la compétition. Moi, je suis un fonceur et à force de se préparer et de répéter les mêmes gestes, on forge son physique. Et lors d’une épreuve, le mental suit le physique qui est habitué à travailler fort.
Comment êtes-vous arrivée à l’ultra triathlon ?
En 1994, J’ai participé à mon premier Ironman, Après 12 heures d’efforts, j’étais encore bien. J’ai donc cherché pour trouver quelque chose de plus long : le double Ironman (ndr : 7,6 km de nage, 360 km de vélo et 84,4 km de course), mais qui n’existait qu’en Europe. J’ai envoyé des demandes d’informations en France. C’est seulement en 2000 que j’ai sauté pas en participant au premier double Ironman de Lévis, au Québec (ndr : 7ème place – en 29 heures 11 minutes). Puis en 2001, j’ai fait partie de la « délégation » de 4 Québécois à participer au Championnat du monde d'Ultratriathlon de Fontanil, en France (ndr : un triple Ironman : 11,4 km de natation, 540 km de vélo et 126,6 km de course à pied), où j’ai fini à la 14ème position en 50 heures et 50 minutes.
Qu’est-ce qui vous a plus dans ce sport ?
L’envie d’aller encore plus loin, de voir jusqu’où peut aller son corps. Dans le petit monde de de l’ultra-triathlon, entre 150 et 200 athlètes, j’y ai trouvé une famille, avec un noyau fort d’amis, une chose qu’il n’y a pas dans L’ironman, trop tape-à-l’œil et commercial. L’esprit de L’ultra-triahlon est basé sur la fraternité et la camaraderie : le premier reste à l’arrivée pour attendre et féliciter les derniers. C’est une loi non écrite, mais qui montre bien le respect que tous les athlètes ont les uns pour les autres.
Quels sont vos projets et objectifs pour 2013 ?
En septembre 2013, il va y avoir, en Italie, un triple décairoman, soit 30 triathlons distance Ironman en 30 jours. Dans l’histoire du sport, cela ne s’est jamais fait. Il y aura une trentaine de participants. On n’est même pas sûr que quelqu’un puisse s’y rendre jusqu’au bout. C’est un projet très excitant, c’est le défi d’une vie et je compte bien en être ! Mais cela demande une grosse logistique et de l’argent, au moins 10 000 dollars. Je vais donc devoir faire des levés de fond, même si je n’aime pas quêter. Depuis que je fais ce sport, j’ai rencontré du monde, certains m’ont fait des promesses mais ne les ont pas tenues. J‘ai perdu beaucoup de temps à cause de ça. Seulement, pour cette course, je n’ai pas le choix, je dois trouver des financements.
Comment cela se passe avec vos commanditaires ? Est-ce difficile d’en trouver ?
J’ai plusieurs entreprises qui m’aident, comme Ecco, Apogée, Synergie… mais ce sont surtout au niveau du service et du matériel. Pour le support, financier, c’est très difficile de trouver des commanditaires. Honnêtement, je suis un passionné de ce sport, mais je suis essoufflé financièrement.
Actuellement, quelle est votre situation professionnelle ?
Je travaille en psychiatrie à l’hôpital Sacré-Cœur. Je suis professeur de spinning, de course à pied. Je donne aussi des conférences dans les entreprises et dans les écoles, primaires, secondaires et Cégep. C’est important de leur expliquer, spécialement aux jeunes, comment fonctionne le corps humain, quels sont les mécanismes et les phénomènes derrière l’activité physique.
Vous avez des journées et des semaines bien chargées. Est-ce que vous arrivez quand même à aérer l’esprit avec d’autres activités ?
Oui, je suis quelqu’un de simple et curieux de nature. Je m’intéresse à beaucoup de choses, comme l’actualité, la science… Le sport aussi, mais uniquement le sport amateur, pas le sport professionnel qui prend une place bien trop grande de nos jours. Ça en devient honteux. Je lis beaucoup, j’écoute la radio car j’en ai fait pendant 15 ans.
Encore plus
ultrayves.ca
Yves Beauchamp : l’homme de fer – Espaces, mai 2009