Maxim et Pierre-Luc Poulin : frères de pagaie
À gauche, Pierre-Luc Poulin, 16 ans, kayak de vitesse. À droite, Maxim Poulin, 18 ans, canoë de vitesse. Membres du club de Canoë-Kayak Lac-Beauport, ces deux frères sont la nouvelle génération de pagayeurs canadiens et font déjà parler d’eux au plus haut niveau. Maxim est sept fois médaillés aux Championnats canadien et détient trois records canadiens en individuel. Pierre-Luc a récemment remporté 4 médailles à la Régate olympiques des espoirs, l’équivalent des JO pour la catégorie junior. Entrevue croisée avec ces deux jeunes gens, aussi à l’aise sur un plan d’eau que pour répondre aux questions.
Pourquoi avoir choisi le canoë-kayak de vitesse ? Qu’est-ce qui vous a plu dans ces sports ?
Maxim : C’est une histoire un peu farfelue. Le vendeur de journal de ma commune, quand ma mère était enceinte, c’était Maxime Boilard, canoéiste qui est allé les JO de Sydney en 2000. À l’école primaire, il est venu dans ma classe faire une conférence. Cela m’a donné envie de faire du canoë. J’ai tout de suite accroché : pouvoir passer ses étés à jouer au bord de l’eau avec ses amis, aller sur différents plans d’eau et faire des compétitions dans tout le Québec... C’est être dans un environnement exceptionnel.
Pierre-Luc : Au départ, quand mes parents m’ont demandé quel sport je voulais faire, le canoë-kayak, ça m’était indifférent. Depuis le quai, je regardais mon frère s’entraîner dans des programmes de haut niveau, avec Frédéric Jobin (ndr : entraîneur de sprint avec l'équipe nationale). Un jour, Fred, alors qu’il entraînait, m’a dit : « embarque dans ma chaloupe ». Il m’a présenté les athlètes. Puis, il m’a donné comme cadeau un DVD sur les Championnats du monde. J’ai vraiment accroché là-dessus, à tel point qu’aujourd’hui, il ne marche plus tellement je l’ai regardé ! L’année d’après, j’ai gagné mon premier championnat provincial.
Quelle qualité de sportif vous reconnaissez l’un à l’autre ?
Maxim : La plus grande qualité de Pierre-Luc, c’est quelqu’un de travailleur. Nos sports ne sont pas très connus, les groupes d’entraînements ne sont pas très importants. Il est capable de s’entraîner très fort, même s’il est seul sur l’eau. En canoë et en kayak, ce n’est pas la même vitesse, donc on ne peut pas s’entraîner ensemble.
Pierre-Luc : Quand on parle de Maxim, on ne peut pas passer à côté de sa persévérance. Il a eu beaucoup de malchance plus jeune, des blessures, notamment à l’épaule, qu’ils l’ont empêché de bien performer.
Actuellement, quelle est votre situation sportive ?
Maxim : Je ne suis pas professionnel mais je suis breveté. Je reçois un financement du gouvernement du Canada, qui me donne un salaire pour l’année. Je reste toutefois étudiant à temps plein pour la session d’automne, en sciences humaines au Cégep Limoilou, à Québec. Pour la session d’hiver et d’été, je poursuis mes études à distance, donc à temps partiel.
Pierre-Luc : Je ne suis pas breveté comme Maxim. Je suis au collège Francois-de-Laval à Québec, à temps plein, de 8h30 à 15h30. Les entraînements se font après. Je manque seulement 2 mois d’école, pendant l’hiver, pour partir en stage de présaison, en Floride, entre mi-février et mai.
Comment se construit une saison de canoë-kayak ? Quel est le calendrier de l’année ?
Maxim : Les compétitions de canoë et de kayak sont les mêmes, aux mêmes dates, avec les mêmes distances. Elles se déroulent majoritairement l’été, à partir de fin mai, avec des compétitions qualificatives pour la Coupe du monde et les Championnats du monde, jusqu’à la fin août début septembre. La saison des épreuves se termine généralement avec les Championnats canadien. Quelquefois, comme cette année, il y a les Jeux olympiques juniors, à la mi-septembre. Ensuite, la saison automnale sert à faire beaucoup de volumes sur l’eau. On y fait pas mal de distances, mais sans intensité. Au club, on arrête de ramer le 1er novembre, car il fait trop froid. On sort de l’eau et on intensifie les entraînements en musculation, 4 jours par semaine. On fait aussi du ski de fond 3 fois par semaine, de la natation 2 fois par semaine. On a aussi des machines à ramer, environ 2 sessions par semaine en hiver. Enfin, on part en stage en Floride pour se réentraîner avant de recommencer le cycle de compétitions.
Quels sont vos objectifs, vos ambitions pour 2013 ?
Maxim : On a des objectifs déjà ciblés. Pour moi, cela serait de participer aux Championnats du monde moins de 23 ans, qui vont se passer à Welland, en Ontario. L’autre objectif important est de remporter, en individuel, les Jeux du Canada, qui auront à Sherbrooke en août prochain. Et puis pourquoi ne pas battre mes propres records !
Pierre-Luc : 2013 va être une très grosse saison, avec mes premiers Championnats du monde junior et les Championnats du Canada. Avec les performances que j’ai réalisées aux Olympiques juniors, je ne peux pas cacher que je rêve tous les jours à remporter une médaille aux mondiaux et au niveau canadien.
En parlant de vous, Pierre-Luc, Frédéric Jorbin dit que c’est « du jamais-vu à cet âge-là pour un athlète du club Lac-Beauport ». Comment gérez-vous, tous les deux, cette attente, cette forme de pression sur vos épaules ?
Pierre-Luc : La pression, oui, elle existe, mais c’est que l’on se met soi-même, au niveau que je souhaite. Si je veux aller aux JO dans 4 ans, il faut bien commencer quelque part. Cela oblige à être au niveau, à avoir les meilleures performances possibles, à apprendre de mes erreurs.
Maxim : Au quotidien, la pression n’est pas vraiment là. On fait ce que l’on a faire. Nos programmes d’entraînement sont bien établis. Le stress en compétition, c’est normal, ça fait partie du jeu. On a confiance en nos capacités.
Les Jeux olympiques de 2016, c’est déjà quelque chose que vous avez à l’esprit ?
Maxim : Oui. En 2016, j’aurais 22 ans et Pierre-Luc, 20 ans. On ne sera pas trop jeunes, ça ne serait pas quelque chose d’original de représenter le Canada par des jeunes athlètes. C’est un objectif qui nous fait rêver, mais qui est réalisable. Il nous reste beaucoup de chemin à faire pour y arriver.
Vos journées et vos mois sont bien chargés, entre l’entraînement et les études. Quels sont vos passe-temps pour vous aérer l’esprit ?
Maxim : On est tous les deux des passionnés de sport. Quand on part pour une journée de ski de fond, même si ce n’est pas en rapport direct avec l’entraînement, ça nous fait du bien. Pour faire retomber la pression, j’aime regarder un bon film avec ma copine. On fait souvent de la motoneige avec notre père, qui est un passionné.
Pierre-Luc : Ce n’est jamais un sacrifice d’aller s’entraîner, de rater une fête entre amis le vendredi soir pour se lever tôt le samedi. Je me vide aussi la tête pendant les séances d’entraînement. Quand cela devient plus difficile, j’essaye de me rappeler pourquoi je me bats.