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  • Crédit: Africa Studio

Sécurité en plein air : outils pour sauver des vies

Vous préparez une expédition de longue durée? Avec les formations existantes et la technologie disponible, il n’y a plus d’excuses pour ne pas assurer votre survie.

Parc national de la Gaspésie, 14 avril 2005. Après une tempête qui a laissé plus de 30 cm dans les Chic-Chocs, je m’élance en planche à neige dans la coulée la plus à l’est sur la face nord du mont Hog’s Back. À ma plus grande surprise, je ne rencontre que des plaques de glace. Pas de poudreuse. Je m’installe à mi-piste pour filmer mon ami Mathieu. Il prend une autre ligne pour trouver de la belle neige. Et vlan : tout décroche! Le petit point noir que j’essaie de suivre des yeux disparait rapidement...

Quelques secondes plus tard, tout s’est arrêté. Je cherche des traces d’équipement pour me donner des indices pour retrouver Mathieu, car nous n’avons pas d’équipement de localisation (ARVA ou DVA). Je cherche et cherche encore, avec le stress d’avoir une autre avalanche qui me tombe sur la tête... Si c’était le cas, nous serions pris au piège tous les deux. Après 20 minutes de recherche, je prends la décision la plus difficile de toute ma vie : je quitte mon ami enfoui sous la neige pour aller chercher de l’aide. Dès les premiers instants, je me demande sans cesse si j’ai pris la bonne décision, mais je ne peux plus reculer. Sur le bord de la route, j’arrête une voiture qui m’aide à aller chercher des secours au Gîte du Mont-Albert. Une heure plus tard, l’équipe de secouriste est prête. Ça fait déjà plus d’une heure et demie que Mathieu est enseveli…

Les sept membres de l’équipe de recherche se dispersent dans la zone de dépôt. Assez rapidement, quelqu’un repère un ski dans les bois et Mathieu, pas très loin, qui crie « Je suis ici! » Dès que les secours arrivent, il tombe dans les pommes. Les secouristes le déshabillent, lui enfilent une couverture isothermique et le mettent sur une civière le plus vite possible. Ça faisait près de deux heures que Mathieu était enseveli. Heureusement, sa main gauche était libre et il a pu dégager son visage pour respirer. Il est envoyé d’urgence à l’hôpital de Sainte-Anne-des-Monts. Diagnostic : sept côtes brisées, 1,5 litre de sang dans les poumons et une température corporelle de 30 degrés (des dommages irréparables arrivent dès que le corps atteint 28 degrés!).

Un accident qui aurait pu être évité, comme tant d’autres : « Selon le rapport d’accident, une plaque latérale de chargement de 50-60 cm s’était formée sur une couche de regel. Avec une pente de 38 degrés lors d’une journée chaude d’avril, c’est sûr que le risque était élevé », estime Jérôme Morin-Dumais, instructeur de sécurité en avalanche. « Un cours de sécurité en avalanche aide à mieux comprendre les indices de risques. Les skieurs doivent être en mesure d’identifier les caractéristiques de terrains avalancheux et les signes d’instabilité.

Il y a toujours moyen de faire du bon ski, peu importe les conditions, mais il faut parfois favoriser des itinéraires moins risqués. »

Plusieurs personnes pensent que les risques d’avalanches sont faibles au Québec, alors ils ne portent pas les équipements de recherche adéquats. « C’est tout simplement de l’ignorance que de se lancer dans un terrain avalancheux sans DVA [détecteur de victimes d’avalanches]. Dans l’inconnu, tu t’exposes aux risques », affirme Jérôme Morin-Dumais qui est également le copropriétaire d’Expé Aventure, une compagnie qui organise des expéditions de ski hors-piste dans le secteur du lac La Marte. Alors qu’on peut louer un DVA pour moins de 20 $ par jour, il n’y a aucune raison de mettre sa vie en danger. « C’est bien beau de lire un livre ou de suivre un cours de sécurité en avalanche, mais il n’y a rien de mieux que d’aller sur le terrain pour le vivre. Avec les expéditions, ça nous permet de faire une continuité avec nos cours pour donner une expérience terrain. Après, nos clients sont beaucoup plus autonomes à comprendre les facteurs de risques et pour prendre les bonnes décisions », explique Philippe Bilodeau, l’autre propriétaire d’Expé Aventure. Lorsque l’on part en expédition en région éloignée, on doit être outillé pour intervenir, car on ne peut pas tout prévoir, remarque Pierre Gaudreault, directeur d’Aventure Écotourisme Québec. « Étant donné que les secours peuvent prendre de 24 à 48 h ou même plus, on doit avoir l’équipement et les connaissances pour traiter le blessé tout en préparant le plan d’évacuation. » Car sur le terrain, ça ne sera pas le temps d’improviser si la vie de votre partenaire est en danger.

Au secours!

Crédit: SPOTIl y a cinq ans, l’entreprise SPOT a déclenché une petite révolution en termes de sécurité en plein air en lançant une technologie de balise GPS facile d’utilisation et abordable. « La fonctionnalité primaire du produit est de servir de balise d’urgence. Si un problème survient, l’utilisateur n’a qu’à peser sur le bouton SOS et l’alerte est transmise à un centre d’appel international d’urgence », explique David Milord, directeur régional de la distribution. Dès que le centre reçoit l’appel, il le transmet à la Sureté du Québec et le protocole d’urgence est lancé, comme si l’on signalait le 911. La balise permet de situer la personne en détresse à 10 mètres près. Depuis son apparition sur le marché, plus de 2 400 sauvetages ont été réalisés grâce à cet appareil.

De plus, un signal, envoyé par la balise toutes les dix minutes, permet à la famille et aux amis de suivre la progression d’une expédition en temps réel sur Internet. Il est aussi possible d’envoyer des messages textes préenregistrés. Avec un abonnement qui coute 100 $ par année, la sécurité est dorénavant abordable.

Afin d’offrir une solution complète, SPOT vient de lancer un téléphone satellite qui permet une communication directe avec les secours. Toutefois, les données GPS fournies par le téléphone sont d’une précision de 5 à 25 km! L’entreprise, qui compte déjà 250 000 clients sur la planète, croit tellement en l’avenir de ses produits qu’elle vient de déployer un nouveau réseau de 24 satellites, qui lui ont couté un milliard de dollars.

La « golden hour »

« Quand un problème grave survient, la vitesse est importante. Si l’on veut être certain de ne pas avoir de séquelles, il faut consulter un spécialiste en moins de 60 minutes », explique Christian Trudeau, président d’Air Médic, qui fait ainsi référence à la « golden hour » dans le jargon du sauvetage.

Être transporté au meilleur hôpital selon le problème du blessé en moins de 60 minutes, c’est ce qu’offre Air Médic à ses membres. À partir d’une de ses sept bases déployées à Québec, Mont-Tremblant, Saint-Hubert, Sherbrooke et Saguenay (Saint-Honoré), Chibougamau et Radisson, Air Médic est ainsi en mesure de couvrir plus de 90 % de la population du Québec.

« Un pilote, un paramédical et un infirmer sont prêts à décoller 24 h/24 à partir de chacune des bases. Grâce à ce nouveau mode de fonctionnement, en moins de 10 minutes, on roule à 300 km/h pour aller vous sauver », lance Christian Trudeau.

Coup de hache dans la jambe sur la rivière Moisie, parapente qui ferme sur les Monts-Vallin, perdu en forêt dans le parc des Laurentides ou isolé sur dans les courants torrentiels en plein milieu d’une rivière en Abitibi, voici quelques exemples de situations d’urgence lors desquelles François Rivard, fondateur d’Air Médic et chef des opérations aéromédicales, a du intervenir. « Tout peut arriver. C’est parfois des accidents bêtes ou une allergie, mais dans les cas graves, c’est important d’intervenir rapidement », dit-il.

Depuis le lancement d’Air Médic en 2000, l’idée de base a toujours été d’offrir un service abordable pour en faciliter l’accessibilité. Alors qu’une heure de vol d’hélicoptère coute 3 000 $, il n’en coute que 25 $ par personne pour s’abonner à Air Médic pour une semaine, 120 $ pour une année et 250 $ pour une protection familiale.

Crédit: Air Médic« On a fait au-dessus de 300 missions en 12 mois. Là-dessus, on a sauvé un paquet de vies. C’est sûr qu’on doit rentabiliser nos activités, mais plus on fera d’argent, plus de vies on sera en mesure de sauver », explique Christian Trudeau. Pour améliorer son service, Air Médic est en discussion avec différents fournisseurs afin que des appels d’urgence de leurs membres leur soient communiqués directement afin d’accélérer le sauvetage. Les utilisateurs de la balise SPOT peuvent entre autres demander que l’appel d’urgence soit redirigé à Air Médic. De plus, une application iPhone, qui permet d’envoyer sa localisation exacte à Air Médic, a récemment été lancée.

Le meilleur investissement : la formation

« Les formations de premiers soins ont évolué et les technologies permettent de faire un suivi continu des expéditions. Ça réduit énormément les risques, mais ça ne remplacera jamais les connaissances et les compétences d’un individu, souligne Pierre Gaudreault. Quand on entend des histoires d’horreur, c’est souvent parce que les gens surévaluent leurs capacités ou parce qu’ils sous-évaluent les conditions du parcours choisi. On a alors le cocktail parfait pour un incident ».

Depuis trois ou quatre ans, Marc Gilbert, président de la Fédération québécoise de Canoë-Kayak d'eau vive (FQCKEV), remarque que de plus en plus d’adeptes du kayak croient qu’avec plus de protection, ils seront en mesure de s’attaquer à de plus grosses rivières. Résultats : plus de kayakistes se retrouvent à l’hôpital. « Quand tu investis 2 500 $ dans un kayak, une formation de 200 $, ce n’est pas cher. Le meilleur investissement, c’est toi », dit-il. À défaut de posséder les compétences et l’expérience suffisantes, réalisez des sorties avec des entreprises spécialisées ou faites vos sorties avec des clubs de plein air (ou des fédérations), recommande Pierre Gaudreault. Ça permet aux gens d’aller faire des sorties avec un niveau de défis qu’ils veulent relever tout en étant accompagnés de gens compétents. »

Personnellement, il s’en est fallu de très peu pour que je perde mon ami Mathieu dans une avalanche. Mal formé et mal équipé, j’ai failli y laisser un ami. Comme les formations et la technologie sont facilement accessibles, il n’y a aucune raison de risquer sa vie ou celle de ses amis. Mathieu s’est remis de l’accident. Il a maintenant deux beaux enfants et il a recommencé à faire du ski.

 
Commentaires (1)
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CAHG - 30/10/2013 09:20
Pour plus d'informations sur les cours d'avalanche offerts au Québec cet hiver, consultez le site www.centreavalanche.qc.ca/cours.htm